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Une résolution votée au Bundestag ce matin. La même votée à l'Assemblée nationale cet après-midi. C'est ainsi que Paris et Berlin ont décidé de célébrer ce lundi les cinquante-cinq ans du Traité de l'Élysée. Le texte, soumis aux élus des deux pays, se propose de rédiger cette année un nouveau traité, censé redynamiser une relation privée d'élan depuis quelques années.
À l'époque, en 1963, la force symbolique du rapprochement franco-allemand fut immédiate. Deux hommes qui avaient vécu les deux guerres mondiales l'incarnaient, de Gaulle et Adenauer. Et moins de vingt ans avaient passé depuis la fin des hostilités.
Mais on aurait tort de sous-estimer les ambiguïtés, voire les méfiances, qui régnaient alors. Entre le souverainisme du Général et le fédéralisme d'Adenauer, ce traité était aussi une façon de surmonter les divergences d'approche sur la toute jeune construction européenne. Surtout, ce traité n'était pas dissociable du contexte international de guerre froide.
Pour de Gaulle, se rapprocher de Bonn, alors capitale de la République fédérale, c'était aussi inviter l'Allemagne à s'émanciper de la tutelle américano-britannique. Ce qu'elle ne fit pas. Puisqu'en mai 1963, lors du vote au Bundestag, les législateurs allemands réaffirmèrent, dans un préambule au traité, l'importance de l'Otan pour leur pays, ainsi que leur désir de voir les Britanniques se joindre à la Communauté européenne dans un avenir proche.
Un nouveau traité
Un demi-siècle plus tard, il est frappant de voir que la relation atlantique joue, aujourd'hui encore, un rôle majeur dans ce nouveau rapprochement. Le Brexit et l'élection de Trump ont créé les conditions objectives pour un nouvel élan franco-allemand. Le parapluie américain n'est plus fiable, et le partenaire britannique, longtemps choyé par Berlin en matière commerciale, est sur le départ.
Alors que les forces centrifuges redoublent d'activité, à l'est et au sud de l'Union européenne, l'axe franco-allemand est donc d'un intérêt vital pour les deux partenaires. Avec des incidences politiques différenciées. À Berlin, c'est le projet de relance de l'Europe qui a servi de planche de salut à l'accord CDU-SPD pour une nouvelle grande coalition. En train de naître dans la douleur, comme les divisions profondes du SPD l'ont montré hier.
À Paris, c'est une manière de favoriser l'agenda européen du désormais fameux discours de la Sorbonne du président Macron. La crise politique en Allemagne, et l'aisance du nouveau Président à l'international, permet en outre à la France de rééquilibrer une relation devenue fortement inégale durant la crise, en raison des performances économiques allemandes.
Un deuxième traité, pour quoi faire ? Un texte publié hier par l'Élysée et la Chancellerie annonce la couleur du texte qui sera signé par les deux assemblées ce lundi. Il s'agit d'approfondir la relation à tous les niveaux : harmonisation législative, prévention des crises économiques de la zone euro, concertation sur la sécurité et la diplomatie. Pour définir des positions communes « sur toutes les questions européennes et internationales importantes ». Il s'agit aussi d'expérimenter, dans les zones transfrontalières, des coopérations inédites. La barre est placée haut.
Avec aussi une insistance sur la dimension éducative, linguistique et culturelle pour augmenter les échanges d'élèves, d'étudiants, d'apprentis et de fonctionnaires. Autrement dit pour entrer dans une dimension relativement inexplorée jusqu'ici, hormis par les spécialistes : viser à banaliser un vivre ensemble entre voisins.
https://www.facebook.com/EmmanuelMacron/videos/2095573617341880/
https://www.ouest-france.fr/reflexion/editorial/nouveaux-enjeux-franco-allemands-5517170