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Succès des populistes en Italie : un appel à «plus d'Europe», selon l'Elysée


Le leader du M5S, Luigi Di Maio, mardi à Pomigliano. Photo Alberto Pizzoli. AFP

Dans l'entourage du chef de l'Etat, on souligne que le Mouvement Cinq Etoiles s'est bien gardé, contrairement au FN en France, de faire campagne contre l'Union européenne.

L’heure est grave. Mais la bataille est loin d’être perdue. Non, assure-t-on à l’Elysée, le triomphe des populistes et de l’extrême droite en Italie ne met pas nécessairement à l’arrêt le chantier de «refondation» de l’Europe dont le chef de l’Etat prétend faire la grande affaire de son quinquennat. Certes, le résultat du scrutin de dimanche, marqué par l’effondrement des partis de gouvernement, notamment celui du Parti démocrate de Matteo Renzi, souvent décrit comme le frère jumeau italien de Macron, est une très mauvaise nouvelle : au total, plus de deux électeurs sur trois ont voté pour des candidats eurosceptiques. «Emmanuel Macron avait été présenté comme le Renzi français, on voit comment cela s’est terminé en Italie», triomphait mercredi matin le député LR Eric Ciotti.

«L’expression d’une exaspération»

A l’Elysée, on se refuse à voir dans le scrutin de dimanche un raz-de-marée souverainiste. Précédée de nombreuses autres, depuis le Brexit jusqu’aux élections autrichiennes de décembre, le succès du Mouvement Cinq Etoiles (M5S, populistes) et de la Ligue (extrême droite) confirmerait plutôt qu’il a «urgence à trouver une réponse européenne au défi migratoire». Or cette urgence est justement au cœur du discours sur la refondation de l’Europe, prononcé en septembre à la Sorbonne par Emmanuel Macron. «Le vote italien, ce n’est pas un rejet de l’Europe mais l’expression d’une exaspération face au manque de réponses», insiste Pieyre-Alexandre Anglade député LREM, responsable de la mise œuvre de la stratégie marconienne pour les élections européennes de 2019. A en croire ce jeune député, les Italiens auraient donc confirmé, par leur vote, un besoin de «plus d’Europe».

L’entourage du chef de l’Etat fait remarquer, en outre, que «les populistes italiens, Luigi Di Maio en tête, ont bien compris qu’ils ne pouvaient pas gagner sur une ligne radicalement anti-européenne». Il est vrai que le jeune leader du M5S avait jugé utile, pendant la campagne, de rendre publique une «lettre ouverte à Emmanuel Macron» : «Je suis sûr que lorsque nous nous connaîtrons mieux, vous vous rendrez compte que notre mouvement, non seulement n’est pas une menace, mais qu’il propose les meilleures solutions pour de nombreux problèmes de l’Europe», écrivait le leader populiste sur son blog.

«Capital politique»

Arrivé en tête dimanche avec 32% des suffrages, le M5S s’est bien gardé de faire campagne sur un éventuel retrait de l’Italie de la zone euro, perspective qui lui avait servi de tremplin pour accéder à la scène politique nationale en 2013. «Di Maio a bien vu comment Marine Le Pen avait été mise en difficulté sur cette question. Il a manifestement estimé, dans sa campagne, qu’il avait du capital politique à gagner en s’adressant publiquement à Emmanuel Macron», fait encore remarquer l’Elysée.

Après comme avant les élections italiennes, les stratèges du parti LREM ne renoncent donc pas à leur prétention de renouveler l’offre politique à l’occasion des Européennes de 2019. Macron s’en était expliqué le 13 février lors d’un échange avec la presse présidentielle. Il prétend mettre aussi l’Europe «en marche» en exportant à Bruxelles, la «recomposition» qu’il a provoqué à Paris. «Cette ambition pourra paraître démesurée. Mais c’est le seul moyen de sortir de l’étranglement des mouvements populistes», note le député LREM Jacques Maire.

Europe forteresse ou Europe «qui protège»

L’évolution de la situation politique en Autriche lui donne quelques raisons d’espérer. A peine élu chancelier à la tête d’une coalition avec l’extrême droite populiste (FPÖ), Sebastian Kurz ne s’est-il pas aussitôt employé à faire une démonstration d’eurocompatibilité ? Le 12 janvier, il choisissait Paris comme destination de sa première visite officielle. A l’Elysée, Emmanuel Macron avait salué son «volontarisme» et ses points de convergence avec lui, au nom d’une «Europe qui protège». Kurz avait répondu en demandant à «être jugé sur ses actes», et sur la politique «proeuropéenne», qu’il serait bien décidé à conduire.

Est-ce à dire que «la refondation» marconienne pourrait s’accommoder de l’extrême droite au pouvoir à Vienne et peut-être demain à Rome ? L’Elysée ne pousse pas si loin l’optimisme. Car l’Europe forteresse dont rêve l’extrême droite n’est pas tout à fait «l’Europe qui protège» prônée par Macron. «Ils vont être très raides sur la question migratoire», reconnaît-on à Paris, sans pouvoir exclure qu’un futur gouvernement italien puisse dépasser, à ce propos, les limites de l’acceptable.

 
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